Les mots qu’il nous faut / Jeanne Henin

« Pour reprendre le pouvoir, remplaçons les mots qui mentent par les mots qui manquent. » Voici le parti pris de ce dictionnaire lumiluttant (mot inventé qui signifie “mu par un espoir radical”) qui enrichit notre vocabulaire et ajoute mille nuances à la couleur de nos émotions.


Le pitch

De festivals en événements publics, Jeanne Henin a invité le grand public à s’asseoir à son bureau des mots pour inventer ceux qui nous manquent. Avez-vous déjà ressenti l’amourtume (geste d’ouvrir le cœur avec courage, prêt à être touché malgré la tristesse possible) ? Ou êtes-vous au bord du burn-âme (exercice d’une activité professionnelle profondément destructrice du vivant) ? Ou encore prêts à vous enlièner en faisant le choix fou d’être en lien, malgré la peur de l’autre ? Ce dictionnaire collaboratif donne vie aux mots qui manquent pour décrire les situations et émotions qui nous touchent. Un petit livre drôlement puissant qui donne vie à de nouvelles réalités.

L’auteure

Jeanne Henin est auteure et chercheuse indépendante spécialiste de la transition écologique, de deep ecology et pratiques collectives.

Pourquoi c’est nouveaux récits ?

  • Les penseurs de l’effondrement (et les praticiens de communication non violente) le disent : parvenir à dire ses maux est la première étape pour décrypter ses émotions, identifier les besoins insatisfaits qu’elles traduisent, et pouvoir gérer ses peurs. Or nous manquons de mots pour décrire nos émotions. Et plus particulièrement celles qui disent notre lien à la terre : cette « alphabétisation émotionnelle » comme Glenn Albrecht la décrit dans son livre Les émotions de la terre.
  • Avec cette co-création avec le grand public des mots qui nous manquent (créations tous azimuts), Jeanne Hénin ouvre des « espaces d’expérimentation qui permettent le questionnement, qui nous font désirer une bascule ».

Les concepts clés

  • « La pensée née d’une émotion n’est-elle pas aussi valable que celle née d’une observation scientifique du monde ? » : en créant les mots qui nous manquent nous ouvrons la voie à une vision de monde plus sensible.
  • « Comment semer le pouvoir ? » : en redonnant à chacun le pouvoir de nommer les choses, on remet l’individu et son pouvoir créateur au centre de l’attention. Et en écoutant ces histoires partagées, on insuffle, on l’espère, de l’énergie pour passer à l’action.
  • « Que se passe-t-il quand j’invite les expériences et les émotions vécues en lien avec d’autres espèces ? » : en inventant ces mots, on change l’attention de l’humain pour tout ce qui est vivant.
  • « Puis-je faire pousser un peu d’empathie ? » : en nommant les émotions qui nous traversent, nous développons notre capacité à accueillir et honorer celles de ceux qui nous entourent.

La définition qu’on aime

Microdabra Nom féminin / Issu du grec micro, petit ; et de abracadabra, formule dite magique. Ensorcellement provoqué par le minuscule pour désarmer le plus grand. Fascination induite par l’observation de la vie à une échelle plus réduite, voire infinitésimale, qui permet une mise en perspective de la place de l’humain et entraîne un oubli de soi bienfaisant. « Il s’apprêtait à détruire une nuée de pucerons sur ses rosiers quand son geste s’arrêta net. Hypnotisé par l’organisation de cette vie minuscule, il entra instantanément dans un microdabra qui retint son geste. L’insecticide lui tomba des mains. »

Boomère Nom féminin / Issu de l’anglais boomer, personne née entre 1945 et 1970; et du français mère. Figure maternelle qui apporte un soutien aux générations plus jeunes ayant fait des choix de changement complet de mode de vie par éthique. Faisant fi des possibles différences idéologiques, elle choisit le soin et la solidarité entre générations. “Zineb est passée au pré joli, elle a laissé à la porte de la yourte : des chaussures pour Mia et un billet de 50 euros pour payer le dentiste. Heureusement que ta mère est une boomère.”

Fertilierre Adjectif / Issu du fertile et de lierre. Capacité à grimper sur toutes sortes de surfaces grâce à la force donnée par les générations suivantes ou déployées pour elles. Une personne fertilierre  une pugnacité qui lui permet de dépasser ses peurs, de se faire confiance et de continuer à grimper, quoi que dise l’actualité, même si les nouvelles sont mauvaises. Elle va à l’essentiel et elle tient bon. “La joie de partager cette marche avec ma fille me rend encore plus fertilierre; je me sens prête à déplacer des montagnes.”


D’autres lectures inspirantes

Petit manuel de résistance contemporaine de Cyril Dion

Reinventing organisations Frédéric Laloux

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